Critique littéraire n°14 : Suite Française, Irène Némirovsky (2004)
Suite
Française, Irène Némirovsky, 2004
Suite Française est un roman
qui regroupe les deux premiers tomes d’une série inachevée de cinq romans sur
les thèmes de la débâcle de 1940, de l’exode et de l’occupation allemande.
Ecrite entre 1940 et 1942, cette série romanesque est interrompue par la mort
de son autrice, Irène Némirovsky, déportée à Auschwitz en 1942. Autrice à
succès dans les années 1930, Irène Némirovsky est oubliée après la Seconde
Guerre Mondiale puis redécouverte grâce au travail de ses deux filles qui
retranscrivent le manuscrit de leur mère. Les deux premiers tomes de la série initialement
prévue de cinq romans par l’autrice, les seuls qu’elle a pu terminer, sont
ainsi publiés en 2004 sous le titre de Suite Française. Il recevra à
titre posthume le prix Renaudot et deviendra un best-seller. La première
partie, intitulée Tempête en juin, retrace l’exode chaotique de juin
1940 au travers de plusieurs personnages issus de différentes classes sociales
dont les chemins vont parfois se croiser. La seconde partie, Dolce,
raconte le quotidien d’un petit village français durant trois mois d’occupation
allemande, entre collaboration et résistance mais surtout autour du prisme de
l’amour d’une jeune bourgeoise avec un officier de la Wehrmacht.
Ce roman m’avait été conseillé par
ma professeure de philosophie de terminale mais il a trainé pendant quatre ans
dans ma bibliothèque car j’ai mis du temps à trouver le courage de m’attaquer
en lecture au lourd sujet de la Seconde Guerre Mondiale. Ce fut une vraie
claque, surtout la première partie, Tempête en juin, qui raconte au
travers de personnages de fiction l’exode de 1940 face à l’avancée rapide des
allemands. L’écriture est simple, sans fioritures, incisive et souvent ironique
pour retracer les voyages de ces personnalités décrites sans filtres. L’autrice
décrit à la fois la solidarité et l’égoïsme, le mépris de classe, l’angoisse,
l’incertitude avec une précision incroyable qui donne au lecteur l’impression
de suivre également cet exode. L’on ressent à la lecture que l’autrice a la
volonté d’être la plus précise possible dans son récit d’événements
historiques, comme si elle ressentait la nécessité de laisser un témoignage sur
la terrible période que le monde est en train de vivre.
Ce roman est, à mon avis, à lire
absolument si le sujet de la Seconde Guerre Mondiale vous intéresse mais il n’est
cependant pas à mettre entre toutes les mains car il relate parfois des épisodes
assez durs que tout le monde n’est pas capable de supporter. L’écriture tombe
si juste que l’immersion est totale, l’on a souvent l’impression d’être face à
un documentaire plutôt qu’à une œuvre de fiction. De plus, l’édition que j’avais
(Folio) proposait, à la fin de l’ouvrage, des copies des notes d’écriture d’Irène
Némirovsky ainsi que la correspondance de l’autrice et de ses proches à l’époque
de la déportation d’Irène Némirovsky, éléments qui ne font que renforcer le
tragique de l’œuvre et de la vie de son autrice. Je recommande fortement ce
roman fort, poignant et qui relate sans filtres, loin des mythes révisionnistes,
les premières années de la Seconde Guerre Mondiale en France.
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